"Le sentiment du paysage a beaucoup à voir avec la mémoire. Nos attachements aux lieux que nous côtoyons sont fait de familiarité et de liens qui nous unissent quotidiennement à nos voisins par un tissu d'habitudes qui sont autant de souvenirs diffus des évènements, petits et grands, qui ont pris place sur cette place, dans ce parc, dans cette rue. Cette relation affective, cette remémoration spontanée, et pour l'essentiel informulée, n'a d'ailleurs pas besoin de familiarité pour s'activer : dès que nous entrons en contact avec un lieu nouveau, dont nous ignorons tout de prime abord, nous sommes saisis dans un faisceau d'impressions, d'intuitions, de sens natifs qui s'énonce peu à peu en émotions, en images, en associations d'idées qui insèrent l'inédit dans une trame de significations diffuses. N'est-ce pas là ce qui fonde une bonne part de notre attachement viscéral aux paysages, comme si tout un pan de nos histoires personnelles et collectives s'y était déposé, si bien que toute action portée sur eux, même quand elles n'ont pas d'impact concret sur nos vies, nous concerne étrangement."